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Averroes

En Islam, la philosophie inspirée des Grecs (la falsafa) a eu une histoire complexe. Intégrant dès le début des éléments variés à son aristotélisme néo-platonisant, elle culmine en Orient avec Avicenne (Ibn Sina), dont la pensée devait connaître des développements nouveaux en Iran. Averroès (Ibn Rusd) est, symétriquement, le principal philosophe musulman de l’Occident, mais son projet et son destin furent tout autres.

Pour lui, la philosophie est uniquement celle d’Aristote, et c’est elle qu’il veut retrouver dans sa pureté en éliminant les interprétations qu’en ont donné ses prédécesseurs musulmans (les falasifa, ou philosophes) et même les commentateurs grecs. Il se l’approprie avec assez de pénétration et de puissance pour construire un système qui porte sa marque personnelle tout en se tenant au plus près d’Aristote.

Mais on ne lui trouve pas de postérité en Islam : persécuté sur la fin de sa vie, c’est à des juifs et à des chrétiens attachés à conserver et traduire ses Å“uvres qu’il doit son influence posthume. Encore cette survie est-elle marquée par une mauvaise compréhension de sa pensée, comme Renan l’a noté. Les spécialistes retrouvent progressivement le véritable Averroès, précisant notamment ce que fut sa pensée religieuse, qui n’a rien perdu de son actualité.

1. Médecin et juriste

Abu l-Walid Muhammad ibn Ahmad ibn Muhammad ibn Rusd (dont le nom devint, pour l’Occident, Averroès, quand ses Å“uvres furent traduites en latin) naquit à Cordoue en l’an 520 de l’hégire, 1126 de l’ère chrétienne. Cordoue était le lieu d’une activité intellectuelle brillante ; la famille d’Averroès comptait des juristes célèbres (notamment son grand-père), et la philosophie chez les musulmans d’Espagne était encore vivace, bien que fort suspecte aux théologiens et à la foule des croyants. En 565/1169, Averroès est qadi à Séville, peu de temps après avoir été présenté à l’émir Abu Ya‘qub Yusuf par le philosophe Ibn Tufayl ; vers 567/1171, il est à Cordoue, probablement encore comme qadi. En 578/1182, il devient, à Marrakech, médecin de Yusuf, en remplacement d’Ibn Tufayl ; il remplira les mêmes fonctions auprès du successeur de Yusuf, Abu Yusuf Ya‘qub al-Mansur. Mais, attaqué par les tenants d’une orthodoxie religieuse étroite, il tombe en disgrâce vers 592/1195, et meurt en 595/1198.

Pour avoir quelque idée de la stature intellectuelle d’Averroès, il convient de considérer l’ensemble de ses Å“uvres, et notamment de ne pas oublier que ce philosophe fut aussi médecin et juriste ; c’est même à ce double titre que s’exerça sa carrière officielle, et il écrivit d’abord sur la médecine et le droit. Vers la quarantaine, il composa en effet un grand traité médical intitulé al-Kulliyyat (Généralités, titre qui deviendra Colliget dans les traductions latines) ; il y tenait assez pour le remanier sur la fin de sa vie. Parmi ses autres ouvrages de médecine, on peut citer des commentaires sur divers écrits de Galien et sur un poème médical d’Ibn Sina (lui aussi médecin et philosophe). De la même époque que les Kulliyyat date la Bidaya, ouvrage consacré à des questions discutées en matière de fiqh (droit, au sens musulman, selon lequel le religieux et le juridique ne se dissocient pas), et qui lui a valu une certaine réputation en ce domaine. Cela dit, et une fois signalé qu’il a aussi traité d’astronomie et de grammaire, il est certain que le meilleur de la gloire et du génie d’Averroès se fonde et se manifeste en ses écrits philosophiques.

2. Averroès et Aristote

C’est surtout comme commentateur d’Aristote qu’Averroès fut connu des Latins : il est pour eux « le Commentateur », comme Aristote est « le Philosophe ». C’est ainsi que Dante le présente, dans les Limbes, au milieu d’autres philosophes et savants : « Averroès, qui fit le grand commentaire » (Inferno, IV, 144). C’est aussi de cette façon qu’il commença sa carrière de philosophe : à l’occasion de sa présentation à Abu Ya‘qub Yusuf par Ibn Tufayl, Averroès fut sollicité par l’émir de commenter les ouvrages d’Aristote. Il se mit aussitôt à l’Å“uvre, et en une vingtaine d’années écrivit sur presque tous les traités du corpus aristotélicien. Le nom générique de commentaire en couvre plusieurs espèces distinctes ; la plus aisément reconnaissable est celle du « grand commentaire », où Averroès suit le texte pas à pas et formule les problèmes que suscitent certains passages, rapporte les solutions avancées par les commentateurs antérieurs, les examine, expose la sienne propre : cela donne lieu à des développements parfois très longs. Les « petits » et « moyens » commentaires ne se laissent pas toujours bien distinguer ; Averroès y expose de la façon qu’il juge la meilleure la matière du livre qu’il explique. Ajoutons qu’il a composé aussi de courts ouvrages (questions, traités, abrégés, etc.) sur un grand nombre de sujets philosophiques. Il faut noter d’autre part qu’un certain nombre de ces ouvrages ne nous sont pas connus dans leur langue originelle, mais dans des traductions hébraïques ou latines : citons, pour nous en tenir à un exemple, le grand commentaire du traité De l’âme, accessible dans sa seule traduction latine (dont le vocabulaire et la syntaxe pleine d’arabismes prouvent l’extrême littéralité).

Le respect d’Averroès pour Aristote est bien connu ; c’est une attitude naturelle de la part d’un commentateur. Mais l’éloge qu’il en fait va parfois jusqu’à lui attribuer plus qu’une supériorité contingente, et à conférer à son existence une signification proprement exemplaire. On en jugera d’après ce passage du grand commentaire du traité De l’âme (III, 14) : « Ce point est si difficile que, si Aristote n’en avait pas parlé, il eût été très difficile, impossible peut-être, de le découvrir – à moins qu’il ne se fût trouvé un autre homme comme Aristote. Car je crois que cet homme a été une norme dans la nature, un modèle que la nature a inventé pour faire voir jusqu’où peut aller la perfection humaine en ces matières. »

De fait, Averroès est un aristotélicien fidèle, le plus fidèle sans doute de tous les grands médiévaux. Si sa propre pensée, formée en des temps et des lieux très différents de ceux du Philosophe, s’en détache en certains points, elle s’appuie toujours sur des principes authentiquement aristotéliciens.

3. Philosophie et religion

Ici apparaît aussitôt un problème : comment Averroès peut-il être à la fois musulman et aristotélicien, juriste traitant d’obligations fondées sur un texte révélé et philosophe pour qui le monde est éternel ? Averroès s’explique sur ce point, notamment dans son Fasl al-maqal (Traité décisif ). Il n’y a pas de contradiction entre la philosophie et la loi divine : celle-ci, au contraire, appelle à étudier rationnellement les choses ; d’autre part, « le vrai ne peut contredire le vrai ». On peut donc se proposer légitimement d’« unir le rationnel (ma‘qul) et le traditionnel (manqul) ». Ce programme est possible, parce que la loi divine a un sens extérieur (zahir) et un sens intérieur (batin) : les hommes capables de science doivent pénétrer jusqu’à celui-ci et le garder pour eux, les autres se contentant du premier, qui précisément leur est destiné. Si les préceptes pratiques s’imposent à tous indistinctement, les comportements doivent nécessairement différer en matière théorique. La seule attitude qui ne soit pas justifiée est celle des mutakallimun (théologiens) qui, communiquant aux gens du commun des interprétations mal fondées, jettent le trouble dans les esprits ; faute de connaître les véritables méthodes rationnelles, ils s’en tiennent à des argumentations simplement probables, sur quoi rien de certain ne peut se fonder. Sur ces bases – distinctions corrélatives des sens du Coran, des capacités intellectuelles et des modes de démonstration – Averroès a composé un ouvrage intitulé Découverte des méthodes démonstratives concernant les dogmes religieux (585/1189). Il y traite de plusieurs points fondamentaux de la foi islamique (l’existence de Dieu, son unicité, ses attributs, ses actions…) en substituant aux formulations et aux arguments des écoles théologiques, qu’il critique en détail, un exposé qui, fondé sur le seul texte coranique, doit convenir à la fois aux simples et aux savants (aux aristotéliciens). Un exemple fera comprendre cette méthode. Soit le problème de la corporéité de Dieu : bien qu’il n’affirme rien de positif sur ce point, le Coran semble suggérer que le Créateur a un corps. Certains mutakallimun ont prétendu prouver qu’il n’en était rien ; mais leurs démonstrations ne sont pas solides ; d’autre part, à dire aux gens du commun que Dieu est sans corps, on risque fort de leur faire conclure qu’il n’existe pas. La meilleure attitude consiste à ne pas aller plus loin que la Loi, c’est-à-dire à n’attribuer à Dieu ni la corporéité ni l’incorporéité. Et si l’on demande ce qu’il est, il faut, se référant au texte révélé (Coran, XXXIV, 35) et à la tradition du Prophète, dire que Dieu est lumière. Ainsi on ne s’écarte pas de la Loi ; on signifie aux gens du commun une existence réelle et particulièrement noble ; on rappelle aux savants que leur intelligence est aussi incapable de saisir Dieu que les yeux des chauves-souris le sont de voir le Soleil (allusion à Aristote : Métaphysique, II, 1, 993 b, 9-11). Dans l’ensemble de ce traité, Averroès apparaît au point de convergence de trois perspectives doctrinales : la théologie musulmane, qu’il refuse mais qu’il connaît assez à fond pour la critiquer de l’intérieur ; la révélation coranique et la philosophie d’Aristote, qu’il accepte intégralement l’une et l’autre comme deux expressions différentes du vrai. On aura relevé au passage la comparaison de la chauve-souris : Averroès ne croit pas que la raison soit capable de saisir tout le contenu de la révélation. Comme il le précise dans un autre ouvrage, l’incapacité de l’intelligence est double : l’une est relative, propre à une certaine classe d’esprits, et provient soit de la constitution individuelle, soit de l’absence d’instruction ; l’autre est absolue, et tient à la nature même de l’intelligence. On notera que, dans le texte résumé ci-dessus, c’est une image tirée du Philosophe lui-même qui illustre cette limitation radicale.

L’ouvrage auquel on vient de faire allusion est une réplique au grand penseur musulman Gazali (mort en 501/1111), qui avait écrit un livre destiné à ruiner les doctrines de divers philosophes : le Tahafut al-falasifa (L’Écroulement des philosophes). Averroès y répond en composant, à une date indéterminée, son Tahafut al-Tahafut (L’Écroulement de l’écroulement). Il cite de longs passages de Gazali et les réfute méthodiquement. Or son but n’est pas de réhabiliter les philosophes critiqués (Farabi, Ibn Sina), mais de revenir, au-delà de ces systèmes que lui-même n’admet pas, à l’authentique philosophie aristotélicienne. Averroès nous offre ici le tableau d’un monde sans commencement ni fin temporels, où les sphères tournent éternellement parce qu’elles dépendent de l’activité éternelle du Premier Agent. Ce Dieu d’Aristote agit selon un mode qui n’est ni volontaire ni naturel, mais que la Loi révélée appelle volonté. Créateur, sa science des êtres existants n’est ni universelle (car la connaissance par l’universel est abstractive et potentielle) ni particulière (car le particulier, matériel et multiple, est sans rapport avec l’unité de l’intellect divin) : la science divine est toute différente de la nôtre, parce que – Averroès le dit encore dans son grand commentaire sur la Métaphysique, et dans un petit traité consacré à la « science éternelle » – elle est la cause de l’existence de l’être, et non pas son effet. Dieu connaît, Dieu crée, c’est tout un : son essence créatrice est coextensive à la science qu’il a de ses créatures. L’identification en Dieu de l’« être » et du « connaître » est conforme à la théologie aristotélicienne, de même que l’éternité du monde ; en liant ces thèmes à celui de la création, Averroès les éclaire d’un jour qui n’est plus grec, mais coranique ; on a vu qu’il se référait explicitement à la révélation, et qu’il affirmait l’incapacité de l’intelligence humaine à en saisir le contenu entier. Ainsi la pensée d’Averroès apparaît comme un ensemble complexe où s’enlacent et s’équilibrent des éléments venus d’Aristote et d’autres venus du Coran – d’une façon très différente toutefois de ce que sera la scolastique chrétienne. Averroès ne plie pas le philosophique au révélé pour bâtir une théologie, il fait droit absolument à l’un et à l’autre en les maintenant chacun dans sa sphère ; cet écart est la condition de leur accord, et, il faut le noter, laisse toute latitude au travail autonome du philosophe.

4. Théorie de la connaissance et béatitude intellectualiste

Les commentaires du traité De l’âme exposent une théorie de la connaissance qui exploite les passages, quelque peu obscurs, où Aristote parle des intellects : celui qui reçoit l’intelligible comme le sens reçoit le sensible, et celui qui est la cause de la connaissance. Averroès explique que, si nous connaissons intellectuellement, c’est parce que les formes recueillies dans l’imagination, et potentiellement intelligibles, le deviennent actuellement sous l’action de l’intellect « agent » ; alors elles « meuvent » à leur tour l’intellect « matériel » (ainsi nommé parce qu’il joue ici un rôle analogue à celui de la matière ; l’expression remonte à Alexandre d’Aphrodise, commentateur grec des IIe-IIIe siècles après J.-C.). Ces deux intellects sont l’un et l’autre éternels, et uniques pour tous les hommes. C’est en eux que s’opère réellement la pensée. Éternelle comme le monde, l’espèce humaine fournit sans défaillance à leur incessante actualité ; bien que les individus meurent, toujours d’autres les remplacent, et si la science vient à manquer en un point de la Terre, on peut être assuré qu’elle est en quelque autre : l’homme, en tant qu’être spécifique, est toujours nécessairement « joint » aux intellects. Bien entendu il en va autrement pour les hommes particuliers : la pensée de chacun est liée à ses propres images. C’est pourquoi, malgré l’unicité des intellects, les pensées de chaque homme sont différentes de celles des autres ; cela explique aussi que ma pensée soit, en un sens, mienne, puisqu’il dépend de moi de me joindre à l’intellect agent, c’est-à-dire de faire que l’intelligible soit abstrait de mes images. Mais, Aristote l’enseigne, l’imagination est liée au corps, et meurt avec lui : c’est pourquoi la pensée individuelle est périssable, et, après la mort, « nous ne nous souvenons plus ». Ainsi paraît supprimée toute croyance en une immortalité personnelle ; toutefois, dans le Tahafut al-Tahafut, Averroès rappelle que, selon Aristote, l’altération d’un organe, de l’Å“il par exemple, n’implique pas nécessairement celle de la faculté correspondante (ici, de la vue) : ce qui peut laisser supposer que l’intellect n’est pas seul à survivre à la mort du corps. Mais sur la question de l’esprit, l’homme « n’a reçu que peu de science », comme le dit un passage du Coran que cite ici Averroès : et le problème reste ouvert. En revanche, la doctrine d’Averroès est parfaitement nette en ce qui concerne une question débattue depuis longtemps par les philosophes musulmans : celle de la « jonction » (ittisal, continuatio dans les traductions latines) avec l’intellect agent. Notre auteur s’en explique en plusieurs endroits : dans ses commentaires au traité De l’âme, et dans trois « épîtres » consacrées à cette question. Pour comprendre la façon dont nous nous « acheminons vers la jonction », il faut ajouter à ce qu’on a dit plus haut qu’en passant à l’acte, l’intellect matériel devient intellect en habitus, c’est-à-dire possession stable de connaissances, de concepts, dont le nombre s’accroît à volonté. Quand sont actualisés pour nous tous les intelligibles que l’intellect matériel était potentiellement, « aussitôt l’intellect agent se joint à nous » : c’est le terme du mouvement vers la jonction. De quoi s’agit-il au juste ? La connaissance par abstraction est dépassée : si l’intellect matériel acquiert de la perfection en pensant des formes engagées dans la matière, il le peut à plus forte raison en pensant des formes immatérielles, intelligibles par soi (cela vient encore d’Alexandre d’Aphrodise). D’autre part, le grand commentaire sur la Métaphysique explique que les substances séparées – et l’intellect agent en est une – peuvent être connues intellectuellement par nous, bien que ce soit difficile. La « jonction » nous unit donc à l’intelligible pur : c’est alors « la béatitude », « le grand but, l’immense bonheur » ; l’homme en cette situation fait le lien entre l’actualité de l’intelligible et le sensible, puisque c’est en pensant ce dernier qu’il s’est élevé « de perfection en perfection, de forme en forme ». Averroès va jusqu’à dire que, selon Thémistius (IVe s.), il est alors « assimilé à Dieu en ce qu’il est et connaît tous les êtres : car les êtres, et leurs causes, ne sont que la science de Dieu ». Non que pour Averroès l’intellect agent soit Dieu, mais la jonction à cet intellect élève l’homme au niveau des substances séparées et de l’intelligible pur. Si l’on peut parler ici de mystique, c’est en un sens bien particulier, en rappelant qu’Averroès critique les soufis pour avoir négligé la voie spéculative, et qu’inversement il place la béatitude dans la perfection du savoir : on est alors tenté d’évoquer Spinoza. Mais surtout, dans sa Découverte de la méthode, Averroès, rencontrant le problème de la vision de Dieu, le résout comme il résout toutes les questions de ce genre : le Coran et le Prophète nous ont appris que Dieu est lumière ; les esprits simples comprennent qu’ils verront Dieu comme on voit le Soleil, et les savants que la béatitude est accroissement du savoir (cela complète et nuance ses premiers exposés sur ce thème). Ainsi ce dernier exemple montre à nouveau que, pour Averroès, la félicité suprême se formule aussi bien en termes empruntés à la révélation que dans ceux de la philosophie d’Aristote, selon deux modes distincts et qui doivent le rester.

Jean JOLIVET

R. BRUNSCHVIG, « Averroès juriste », in Études d’orientalisme dédiées à la mémoire de Lévi-Provençal, Paris, 1962

H. CORBIN, Histoire de la philosophie islamique, t. I, Paris, 1964

L. GAUTHIER, Ibn Ruchd (Averroès), Paris, 1948

Multiple Averroès, Actes du colloque intern. organisé à l’occasion du 850e anniversaire de la naissance d’Averroès, Paris, 20-23 sept. 1976, Paris, 1978

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© Encyclopædia Universalis

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